Au cœur du paisible village de Couffy-sur-Sarsonne, niché sur le plateau de Millevaches, se dresse une croix de chemin singulière qui intrigue et inspire. Cette croix, posée sur un bloc de pierre brut, s’inscrit entièrement dans un cercle ajouré aux angles émoussés, à la fois rudimentaire et émouvante dans sa simplicité. Sur sa face nord, l’effigie fruste du Christ crucifié apparaît, taillée dans la pierre avec une naïveté touchante, la tête occupant un tiers du corps, les traits à peine visibles, et vêtu d’une longue robe descendant à mi-jambe. Cet objet sculpté, d’époque romane ou peut-être plus récent dans un style volontairement archaïque, s’inscrit dans une tradition de croix rurales propres à cette région, mais sa forme circulaire la distingue nettement. Située au croisement de la route du cimetière, cette croix, parfois appelée croix de l’Oradou, est un repère spirituel autant que géographique, classée monument historique pour sa valeur patrimoniale. Elle marque un début, une invitation à la contemplation, un point de départ presque initiatique dans le silence des landes et la mémoire de la pierre.
Autour de cette croix, le village de Couffy-sur-Sarsonne déroule son histoire discrète, peu documentée, mais riche d’indices visibles dans son bâti ancien. L’église paroissiale Saint-Martial-de-Limoges, probablement édifiée au XIIIe siècle, en est un exemple frappant. Remaniée à plusieurs reprises à travers les siècles — avec l’ajout d’une chapelle pour la famille de Rochefort aux XVe ou XVIe siècles, puis d’une autre au XVIIIe siècle — elle a traversé des périodes de négligence, d’incendie et de restauration, sans jamais disparaître. En 1908, la découverte d’une sépulture de la famille des seigneurs de Châteauvert, classée elle aussi monument historique, ajoute une profondeur historique à ce lieu de culte. L’église, dans ses pierres rapiécées et ses restaurations successives, raconte l’attachement des habitants à leur lieu de foi, en dépit du temps et des drames. Elle est un second jalon dans un parcours spirituel discret mais poignant, une halte plus intime, abritant les prières, les deuils et les espérances d’une communauté attachée à ses racines.
Mais il ne faut pas clore ce chemin sans franchir une dernière étape, à un kilomètre seulement, dans le petit village de Courteix. Là, la chapelle des Templiers dresse sa silhouette singulière, rare témoignage médiéval en Limousin. Construite au XIIIe siècle, elle conserve ses voûtes en berceau, ses profils gothiques et son abside en cul-de-four. La sobriété de son clocher-pignon et l’élégance rustique de son architecture en font un lieu à part. Jadis propriété de l’ordre des Templiers, rattachée ensuite à l’ordre de Malte, la chapelle conserve des peintures murales du XIVe siècle et peut-être des sépultures de chevaliers. Mentionnée dans les textes dès 1282, intégrée à la commanderie de Bellechassagne, elle est le témoignage d’un passé guerrier et mystique, d’une présence spirituelle ancienne. Ce sanctuaire, perdu dans les collines, prolonge le parcours commencé à Couffy-sur-Sarsonne. De la croix rude et populaire jusqu’à la chapelle templière, se dessine un chemin de pierre et de foi, une forme de pèlerinage à échelle humaine, entre silence, mémoire et lumière.
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